Faire la différence entre être fort et être dur

L'un des points de confusion habituelle concerne l'attitude face aux difficultés de la vie. Et après avoir traversé des épreuves de l'existence, ou même selon une certaine éducation, nombre de personnes considèrent qu'il est important d'être dur pour résister ou simplement tenir quand ça fait mal. S'endurcir pour ne pas sentir la douleur, éviter la faiblesse et se blinder.

Cette attitude de désensibilisation est très efficace et permet en effet de se couper partiellement, voire totalement, de ses émotions. Et c'est là le premier point de confusion. Ne plus sentir les émotions pour refuser les sensations. C'est le principe de l'armure de protection. Comme les chevaliers du Moyen-Âge.

L'inconvénient de cette stratégie de survie émotionnelle, c'est que l'on se coupe de soi, de sa sensibilité, de sa douceur. A tel point que parfois on devient un étranger pour soi-même, au point d'ignorer parfois les messages de son corps, de son cœur. Certaines personnes deviennent comme des automates, des cerveaux sur pattes qui avancent dans la vie ignorant tout d'eux-mêmes, uniquement accaparés par l'environnement, le travail et les données intellectuelles.

Or, cette attitude, bien qu'efficace, a un prix à payer très élevé. Il s'agit de nous-même, de nos sentiments, des liens avec nos être chers. Coupés de nous-mêmes, nous sommes également coupés d'eux. Notre dureté devient un mur qui nous en éloigne. Et nous finissons enfermés dans cette carapace, tels des insectes.

Car c'est précisément la différence entre les vertébrés et les invertébrés. Les insectes sont des invertébrés, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas de squelette, que la structure rigide repose exclusivement sur leur carapace qui est à l'extérieur. Bien dure, bien rigide. C'est elle qui les protège et les sauve. Mais une fois brisée, tout leur intérieur est fragile et facilement réduit en bouilli.

A l'inverse, nous sommes des vertébrés. C'est-à-dire que notre structure osseuse est à l'intérieur et tient l'ensemble des organes. Et c'est un organe très particulier qui recouvre le tout, la peau. Elle a pour fonction de nous protéger mais aussi de communiquer. Toute notre peau est un moyen de communication, d'échange d'informations. La peau capte de l'information sur l'environnement, il fait chaud, il fait froid, c'est sec, c'est humide, etc. Mais elle émet aussi de l'information par la transpiration, les phéromones, etc.

Et cette peau fait que nous pouvons développer notre force en gardant notre sensibilité. Car la peau étant sensible, qui est le gage de la communication, elle favorise la force. Car elle ne l'entrave pas. Au contraire. En prenant du muscle, la peau s'adapte et laisse le muscle se gonfler pour faire face à l'effort nécessaire pour agir. Pour agir malgré la peur, agir malgré la colère, agir malgré la peine.

Là où l'invertébré va répondre de manière quasi mécanique, sans émotions, sans états d'âme, le vertébré va sentir des émotions qui vont le mettre en mouvement et lui permettre de se connecter à lui-même, et a fortiori, à l'autre. Et cette connexion passe par la sensibilité. Force et sensibilité pour donner du sens à la vie et établir des relations vivantes.

Alors oui, le vertébré, le mammifère, l'être humain peut souffrir. Mais la souffrance n'empêche pas l'action. La sensibilité va avec la force. La force va avec la sensibilité. C'est ce qui fait que dans l'évolution les insectes, malgré leur degré de haute efficacité, n'ont pas pu apporter un surcroît d'intelligence, de compréhension, de conscience de la vie.

Vous pouvez donc rester un invertébré dans sa carapace insensible et rigide qui va être efficace mais coupé de lui-même, ou assumer votre humanité, forte et sensible à la fois. Et avancer dans la vie malgré certaines souffrances.